Dans recomposition il y a composition

Quelle est votre origine ? 

Nous avons étudié respectivement à Marne-la-Vallée et à Coimbra avant de nous rencontrer à Londres et de nous établir par la suite à Genève. Notre formation a alterné entre la ville et le contact avec des architectures en marge qui privilégient des relations contingentes avec l’existant et la nature.

Qu’est-ce qui compte pour vous dans la pensée et dans la conception ? 

Nos premiers projets partent du constat qu’il existe toujours de l’existant mais pas forcément un contexte. Il y a le plus souvent des traces de nature déconnectées et de constructions banales. Nous les observons attentivement, accordant autant d’importance à la nature qu’à l’artifice, à l’existant qu’au nouveau, au banal qu’à l’épique. L’intention étant de recomposer avec l’ensemble de ces éléments et il n’est pas exclu que l’un d’entre eux, en apparence mineur, se révèle significatif. D’une part car il nous semble aujourd’hui impossible d’ignorer les vestiges des ruptures passées. D’autre part car dans recomposition il y a composition qui est une tâche éminemment architecturale, capable de mettre en relation des formes a priori indépendantes. Nous pensons nos projets comme des « figures dans le paysage » qui équilibrent leur autonomie avec leur circonstance.

Et comment ces aspects s’expriment-ils concrètement dans le projet bâti ?

Dans le cas de la Maison des Jardiniers, nous avons porté attention à la forêt partiellement présente au nord du site et progressivement abattue pour laisser place à des champs agricoles et des logements collectifs. Le premier geste a été de proposer un espace archétypal de clairière qui articule une hésitation pré existante dans le tracé des chemins publics. Il prolonge d’une certaine façon la présence de la forêt, tout en stimulant la faune et la flore du lieu. Le volume est avant tout un complément à cette clairière avec sa façade courbe qui intègre une fontaine tel un nymphée. Il offre ainsi un nouvel espace de loisir ombragé et ouvert aux habitants.

Ce geste est renforcé par la présence d'une lanterne en toiture qui s’adresse aux promeneurs et accentue la qualité figurative du volume. Son échelle et la composition de ses façades suggèrent qu’il s’agit de la dernière maison du quartier pavillonnaire. Elle trouve son exceptionnalité dans l’inversion de l'ordre traditionnel de la construction. Une délicate façade en bois pliée, lasurée en bleu, prolonge le ciel jusqu’au pied de la clairière et habille une trame plus résistante en brique de terre cuite à l’intérieur. Sur ces murs repose une structure de poutres telle une pergola, filtrant la lumière zénithale qui éclaire les espaces d’atelier.